lundi 23 août 2010

Une journée avec Laurent Wauquiez


Pour la quinzième fois de l'été, le secrétaire d'Etat à l'Emploi a consacré plusieurs heures, mercredi 18 août, à la visite d'une agence Pôle Emploi, en Haute-Normandie, une région particulièrement touchée par le chômage. Récit.


Ce 18 août , l'équipe Pôle Emploi de Dieppe-Sussex est en ébullition lorsque le secrétaire d'Etat à l'Emploi sort de sa voiture avec chauffeur. Arrivé directement de sa résidence de vacances en Belgique, le maire du Puy-en-Velay sillonne les routes de France et prépare la rentrée. C'est sa 15ème visite sur le terrain depuis le 28 juillet. Quatre heures top chrono pour écouter, discuter, convaincre. Une stratégie de communication bien rodée, qui lui permet de rester visible, malgré l'ombre de Christian Estrosi et Brice Hortefeux, grands animateurs de l'été du côté de la majorité.

A 10h30 , Laurent Wauquiez est accueilli par une cohorte de fonctionnaires sur leur 31, postés sur le parking de l'agence, perdue aux abords d'une zone industrielle. A peine entré dans le hall réservé aux usagers, il interroge un couple, pris en charge quelques minutes plus tôt par un employé pour évoquer un problème de trop perçu : "Avez-vous pris un rendez-vous avant d'arriver ?" "Non, l'accueil à été immédiat", répond le mari, quelque peu surpris par cette intrusion. Laurent Wauquiez sourit, visiblement satisfait. Pendant un quart d'heure, il tente de se fondre dans la masse, interpelle les clients et navigue entre les différents espaces ouverts aux chômeurs, le tout sous l'oeil un tantinet crispé de la directrice d'agence et du directeur régional.

Après un premier échange avec une conseillère, qu'il invite à participer au déjeuner, Laurent Wauquiez s'assoit à côté d'une jeune femme qui patiente : "Pourquoi êtes vous venue ici ? Quelle est votre situation ?" A peine le temps de répondre, la directrice s'interpose : heureux hasard, c'est précisément cette demandeuse d'emploi qui va effectuer ses entretiens en présence du secrétaire d'Etat, qu'elle n'a manifestement pas reconnu. "Mon copain n'en reviendra pas quand il apprendra ça !" Pas vraiment impressionnée, Muriel, qui habite Tourville-sur-Arques, à quelques kilomètres de là, s'installe et le "tête à tête" débute. Une chance, son dossier est très bien ficelé et son cas a été rapidement traité par l'agence. Arrivée il y a une semaine de la Réunion, cette jeune femme s'était inscrite en ligne depuis l'île. Pour Laurent Wauquiez, c'est l'illustration parfaite des efforts accomplis sur la réduction des délais de traitement : "Il y a quelques années, une situation comme celle-là était tout simplement inimaginable !"

Simplifier, assouplir, dématérialiser, fluidifier... le secrétaire d'Etat ne manque pas une occasion de rappeler les objectifs prioritaires de la fusion ANPE-Assedic, effective depuis janvier 2009. Cela tombe bien, car en matière de modernité et d'informatique, l'agence de Dieppe est plutôt en avance, avec 60% des demandes d'inscription effectuées sur Internet.

Face à des conseillers plus intimidés que les chômeurs, Laurent Wauquiez consulte les documents qui transitent sur les tables, plaisante et prodigue ses conseils : "Il faut casser le culte du CV, faire des entretiens en simulation, des évaluations en milieu de travail." Puis il s'éclipse discrètement pour s'enfermer dans une salle avec un groupe de syndicalistes.

Ceux-là ne seront pas du déjeuner, qui réunit, à 13h30, une dizaine d'employés autour d'un plateau repas, dans l'agence spécialisée située à quelques mètres de là. Après quelques minutes de flottement, et alors que le politique a retroussé ses manches, la tension redescend et les langues se délient. Entre autres sujets de débat : les conséquences de la fusion, les délais d'indemnisation, les relations avec les entreprises... Rui Lopes, le directeur régional de Pôle Emploi, reconnaît travailler dans un "bassin d'emploi difficile", avec des situations préoccupantes pour les ouvriers professionnels qualifiés. Suite à une hausse récente des inscriptions, un conseiller pointe le problème des chômeurs qui ne se présentent pas aux rendez-vous. Laurent Wauquiez reste ferme: "Le Pôle Emploi, ce n'est pas la boîte du Père Noël. [...] Ne pas venir à un rendez-vous est très grave." Au passage, il signifie tout de même son souhait de voir diminuer le nombre de radiations.

"Prête à tout"

Trois-quarts d'heure plus tard , et pour la première fois depuis le début de son marathon estival, Laurent Wauquiez assiste à un exercice de recrutement pour équipiers polyvalents, en présence d'un employeur de la chaîne de fast-food Quick. Surpris, les neuf postulants ne réagissent pas vraiment lorsque l'homme en costume cravate se présente comme ministre de l'Emploi. Sous son regard attentif, les simulations commencent. Pas vraiment le temps de s'attarder, car le programme prévoit déjà la dernière étape de la visite : le suivi d'un entretien d'adhésion au contrat de transition professionnelle (CTP). Une quinquagénaire, dont le mari est à la retraite, prépare sa reconversion. Elle avoue ses lacunes en informatique, mais se dit "prête à tout" pour retrouver une activité. "Nous arrivons à vendre les compétences des quinquas, mais nous manquons de mesures incitatives", déplore Laurent Wauquiez.

Tout au long de la journée, le sémillant trentenaire martèle ses messages : il faut améliorer le service aux usagers et les relations avec les entreprises. Il évoque également des mesures à venir pour le retour à l'emploi des seniors, avec le tutorat, et l'aide à la création d'entreprise, avec le coaching. Il donne enfin des détails sur la grande concertation qui sera lancée début septembre et qui prévoit l'envoi de questionnaires à 500 000 usagers de Pôle Emploi et 50 000 entreprises.

A 14h40 , Laurent Wauquiez s'engouffre dans sa voiture. Drôles de vacances tout de même. Reste sans doute le secret espoir pour le jeune secrétaire d'Etat qu'une telle mobilisation n'aura pas été inutile à l'heure du remaniement.

jeudi 19 août 2010

Casinos: "une crise latente depuis deux ans"


Baisse de fréquentation, situation financière fragile, concurrence des jeux en ligne : les temps sont durs pour les casinotiers français. Michel Roger, président du Syndicat des casinos de France, appelle le gouvernement à réagir.


La Société française de casinos placée la semaine dernière en redressement judiciaire, le groupe Partouche qui peine à boucler une augmentation de capital... L'actualité du secteur n'est pas très rassurante...

Michel Roger: La situation est préoccupante aujourd'hui, nous vivons une crise latente depuis deux ans. Voilà de nombreuses années que nous échangeons avec le ministère de l'Intérieur pour faciliter l'exploitation des casinos, et avec le ministère du Budget, pour alléger la fiscalité accumulée au fil des ans. Avant, nos interlocuteurs disaient : "Ce n'est pas un souci, les casinos fonctionnent bien", mais aujourd'hui ce n'est plus la même chose. On a clairement oublié de réagir. La baisse de fréquentation et le poids de l'endettement menacent tout le monde, les indépendants comme les grands groupes. Il faut investir régulièrement pour s'adapter. La rentabilité n'est plus ce qu'elle était et les petits casinos restent évidemment plus fragiles que les autres. C'est le risque majeur pour la profession: une sélection naturelle va s'opérer.

Comment expliquer cette mauvaise passe ?

Tout d'abord il y a eu les nouvelles règlementations sur le contrôle aux entrées : les clients n'aiment pas que l'on vérifie leurs papiers et ont peur d'être répertoriés dans des bases de données. Deux ans plus tard, l'interdiction de fumer dans les lieux publics a été également très pénalisante, de même que le resserrement du dispositif sur l'alcool. Ces mesures sont pourtant difficiles à remettre en cause, car elles vont dans le sens de la santé publique. De manière générale, ce sont essentiellement la crise économique et l'interdiction de fumer qui ont provoqué les difficultés actuelles.

Si je prends l'exemple du casino que je dirige, à Saint-Valery-en-Caux (Seine-Maritime), nous avons investi deux millions d'euros pendant la crise, mais aujourd'hui, il faut les rembourser et ce n'est pas facile, malgré un outil de travail modernisé, des nouvelles machines à sous, le retour de jeux traditionnels etc.

La déréglementation des jeux d'argent en ligne est-elle aussi une mauvaise nouvelle pour le secteur ?

Pour le moment, seuls les paris sportifs sont concernés. En septembre, ce sera au tour du poker. Les casinos se sont bien préparés, avec une offre spécifique, mais il faudra attendre quelques mois pour dresser un bilan. En elle-même, cette loi est une bonne nouvelle, car elle induit un impôt et rend légales des activités qui ne l'étaient pas jusqu'ici. Il faut maintenant que la loi soit appliquée avec sérieux et sévérité.

Je constate toutefois que la Française des Jeux reste soumise à moins de contraintes que les casinotiers. Par ailleurs, il subsiste de grosses différences de fiscalité : dans le budget des casinos, le prélèvement fixe sur le produit des jeux [ndlr : maximum 15 %] n'est absolument pas justifié.

Au vu des signes de retour de la croissance, êtes-vous confiant pour l'avenir ?

Dans l'ensemble, la fréquentation baisse moins en ce moment, mais cela reste fragile. On a l'impression qu'il peut y avoir un frémissement. Même si les casinos ne sont pas prioritaires lors d'un regain de consommation, il est évident que nous ne passerons pas à côté de la reprise économique.

La clientèle des casinos se divise pour moitié entre les habitués et les "zappeurs". Comment fidéliser cette clientèle de passage ?

Au risque de dire des banalités, il faut avant tout bien s'occuper de ces "zappeurs" : l'endroit doit être accueillant, le personnel souriant... Un casino est tout sauf un lieu impersonnel, comme une station essence ou un supermarché. Il faut que les clients se sentent reconnus et écoutés. Si vous observez une carte des casinos de France, vous verrez qu'ils sont souvent très proches les uns des autres; le jour où des amateurs veulent revenir jouer, s'ils se souviennent de l'accueil, alors ils reviendront dans votre casino!

Un secteur qui souffre
- Sur l'ensemble des 197 casinos français, une baisse de 4 % du produit brut des jeux (PBJ) aurait été constatée pour les premiers mois de l'exercice en cours (novembre 2009-octobre 2010). Le PBJ était déjà tombé de 2,8 milliards d'euros en 2006-2007 à 2,55 milliards en 2007-2008 puis à 2,3 milliards en 2008-2009. Ces trois dernières années, le secteur des casinos a connu une baisse globale de 20 % de son chiffre d'affaires.
- Le 13 août, la Société française de casinos (SFC), qui exploite trois casinos à Chatel-Guyon (Puy-de-Dôme), Gruissan et Port-la-Nouvelle (Aude), a été placée en redressement judiciaire.
- Le 15 juillet, le casino de Beaulieu (Alpes Maritimes), détenu par le groupe Partouche, était déclaré en cessation de paiement. Partouche va probablement devoir lancer une restructuration en profondeur après n'avoir réussi qu'à lever 77,5 millions d'euros sur les 100 millions espérés, lors d'une récente augmentation de capital.
Actualité des parcs d'attraction français

Alors que Disneyland Paris a dévoilé mardi sa nouvelle attraction, Toy Story Playland, les parcs français semblent connaître cette année une embellie. L'analyse de Didier Arino, directeur du cabinet Protourisme.


Les performances d'Eurodisney au troisième trimestre sont encourageantes. Quels enseignements peut-on en tirer ?

Didier Arino : Je ne suis pas surpris par ces résultats. Le groupe est très souvent critiqué, mais les dirigeants sont de vrais professionnels. La crise de l'an dernier a été bien gérée, ils sont parvenus à contrer l'écroulement du nombre de visiteurs étrangers, pourtant plus dépensiers que les Français. Cette capacité d'adaptation est la force de Disney. Aujourd'hui, l'activité repart, et plus vite que dans les autres parcs. Leur principale préoccupation serait plutôt la gestion des queues...

Le problème de fond de Disneyland Paris n'est pas lié à la fréquentation, mais plutôt à son modèle économique. Le système de facturation est opaque, notamment lorsqu'il s'agit de l'organisation de parades, ou encore de la venue d'experts américains, à la moindre occasion. Les royalties reversées à la maison mère sont également trop élevées. Un autre enjeu important pour le groupe est la gestion du parc Walt Disney Studios, un parc raté dès le départ, avec de mauvaises finitions, et dont la qualité ne correspond pas aux standards de la marque. Mais dans sa globalité, l'univers de Disney en France est plutôt une réussite. L'arrivée de Toy Story Playland ne va rien révolutionner mais va renforcer le parc. Le renouvellement des attractions est d'ailleurs la première condition de la réussite dans ce métier.

Quelle est la situation actuelle dans les autres parcs d'attraction français ?

N'oublions pas qu'à lui seul, Disneyland Paris représente 50% du chiffre d'affaires du secteur. Mais celui-ci est globalement dynamique. A l'image du Futuroscope de Poitiers ou du Puy-du-Fou (Vendée) avec ses Ogres de Feu, les parcs français innovent sans cesse. On y trouve de vrais créatifs, qui sans disposer de budgets inconsidérés font de la "haute couture" : nous ne sommes pas dans l'industrialisation, la patte de l'homme est primordiale. Entre eux, les acteurs s'observent : il y a une vraie émulation, c'est pourquoi l'offre est de haut niveau. Avec 250 millions d'euros investis cette année (hors Disney), le secteur se montre offensif. Certains des sites ont quasiment atteint leur seuil de fréquentation. C'est le cas du PAL (parc animalier en Auvergne), avec près de 510 000 visiteurs l'an dernier, ou encore du Futuroscope (1,7 millions) et de Marineland à Antibes (1,2 millions). D'autres, comme Le Puy du Fou ou Vulcania (Auvergne) disposent encore d'une marge de progression. Bioscope (Alsace), quant à lui, ne décolle pas. Attendons cependant les chiffres à venir, car, pour la plupart des parcs, 70 % du chiffre d'affaires de l'année est réalisé en juillet-août. Cet été, la pluie est un élément perturbateur et les sites accusent aujourd'hui un léger retard.

Quels sont les nouveaux défis aujourd'hui ?

Il faut augmenter le panier moyen des clients, et donc le temps passé dans les parcs. Le public a évolué : avant, les visiteurs arrivaient à partir de 14h pour découvrir une attraction et s'en allaient. Aujourd'hui, la moitié d'entre eux arrive avant 13h. Il faut donc leur donner envie de rester et de consommer ! Le repère étalon est le ticket de cinéma : si les clients payent 10 euros et restent moins de 2 heures, ils sont insatisfaits; inconsciemment, ils désirent un équivalent temps au prix de l'entrée. L'autre objectif est d'atteindre 60 % de "repeaters" [ndlr : clients qui reviennent plusieurs fois] dans les deux ans à venir et de modifier régulièrement 15 à 20 % de l'offre, selon les parcs. Cela suppose de gros investissements.

Quelles sont vos prévisions pour cette fin d'année ?

Hors Disney, le secteur devrait connaître une hausse de fréquentation comprise entre 3 % et 5 % en 2010. Sur la même période, le chiffre d'affaires pourrait progresser de l'ordre de 10 %. La croissance sera ensuite plus modérée, mais n'oublions pas que les parcs français ont un gros potentiel !

jeudi 12 août 2010

Prix du lait: une nouvelle avancée

Prix du lait: une première avancée

Les éleveurs avaient fixé un ultimatum au 12 août pour la reprise des discussions sur le prix d'achat du lait. Ils ont obtenu un nouveau-rendez-vous et d'ores et déjà une promesse de hausse des prix.


A l'issue des négociations entamées ce matin avec les principaux syndicats de producteurs de lait ( FNSEA, FNPL, JA ), le groupe Bel, un des poids lourds du secteur fromager, a annoncé dans un communiqué une augmentation du prix du lait de 10 % pour 2010. De son côté, le groupe Lactalis donnait son accord, " sous conditions", à une hausse équivalente. On attend en revanche toujours le résultat des discussions avec les coopératives Sodiaal et Laïta.

Le prix du lait sera "de 301 euros les 1.000 litres sur l'ensemble de l'année 2010", indique Bel dans son communiqué. Pour le mois de juillet, il a été fixé à 330 euros les 1.000 litres.

"C'est une bonne chose pour les producteurs, une avancée, a réagi Thierry Roquefeuil, secrétaire général de la FNPL. Cela respecte ce qui a été annoncé en 2009, à savoir une hausse de plus de 10% du prix du lait sur l'ensemble de 2010".

Suite à ces annonces, les producteurs ont décidé de suspendre leur menace de boycott, en attendant la reprise des négociations interprofessionnelles qui devraient intervenir avant le 20 août. C'est en tous cas ce qu'a déclaré Christine Lambert, vice-présidente de la FNSEA , à l'issue d'un rendez-vous entre des producteurs et le groupe Lactalis, à Laval.

Les éleveurs ont semble-t-il aujourd'hui marqué un point. Entre les opérations de stickage appelant au boycott de certaines marques grand public (camembert Président de Lactalis, Vache qui rit de Bel ou Caprice des dieux de Bongrain) et l'amicale pression du ministre de l'Agriculture Bruno Lemaire, ils ont réussi à ramener les industriels à la table des négociations. Enjeu : faire respecter l'accord en vigueur sur la fixation des prix, signé le 9 juin 2009.

Celui-ci prévoit :

- la publication trimestrielle d'indices de tendance des marchés laitiers

- une fixation du prix du lait chaque trimestre, par négociation entre producteurs, coopératives et industriels, au sein de l'interprofessionnelle

- l'élaboration d'un prix moyen du lait sur une année pleine

- un plan de soutien à la production laitière par l'Etat, doté d'un montant de 30 millions d'euros.

En juin 2010, la réunion devant établir les prix de juillet, août et septembre avait échoué. Les producteurs reprochaient aux industriels de ne pas répercuter la remontée des cours mondiaux sur leur prix d'achat. Résultat : ils fournissaient leur lait aux coopératives et aux laiteries sans savoir combien ils seraient payés.

Jusqu'ici, la revalorisation des prix de 10 % réclamée par les éleveurs n'avait pas été entendue par les industriels, qui refusaient d'augmenter significativement leurs tarifs, arguant que ceux-ci sont bien plus bas en Allemagne qu'en France. Lactalis a d'ailleurs posé aujourd'hui comme condition à cette hausse "la prise en compte d'un indice de compétitivité avec l'Allemagne". Autant dire que les discussions la semaine prochaine s'annoncent animées.

Pour sortir de la crise, les éleveurs souhaitent également généraliser la contractualisation du secteur, prévue dans la nouvelle loi de modernisation de l'agriculture (LMA) et qui permettrait aux producteurs et industriels d'établir des contrats sur plusieurs années et de fixer à l'avance les prix et les volumes.

mercredi 11 août 2010

Travail du dimanche: une loi pour rien?

Travail du dimanche: une loi pour rien?

La loi Mallié souffle discrètement sa première bougie, en pleine trêve estivale. Le comité parlementaire en charge du suivi de la loi a repoussé la publication de ses conclusions au mois d'octobre... Pas de bilan, donc, mais un état des lieux.


Le texte avait déjà fait l'objet d'intenses polémiques avant même son entrée en vigueur le 10 août 2009. Il prévoit la possibilité d'ouvrir le dimanche pour tous les commerces situés dans les "communes d'intérêt touristique ou thermal" ou "zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente", et définit des périmètres d'usage de consommation exceptionnel (Puce), devant être caractérisés par des "habitudes de consommation le dimanche", dans les zones urbaines de plus d'un million d'habitants. A ce jour, seules les villes de Paris, Aix-Marseille et Lille sont concernées.

La nouvelle loi permet aux salariés des Puce de bénéficier d'une rémunération double le dimanche et de repos compensateur, ce qui n'est pas le cas en zone touristique, où aucune contrepartie particulière n'est prévue, sauf accord spécifique avec l'employeur. Une différence de traitement dénoncée par les syndicats : à leurs yeux, la loi a avant tout creusé les inégalités entre salariés, en "créant des zones où les compensations sont différentes pour une même dérogation", regrettait encore récemment la CGT dans un communiqué.

Un casse tête administratif

La détermination d'une zone touristique s'avère souvent être un parcours du combattant : établie par le préfet sur la seule proposition des conseils municipaux, elle doit être validée par un accord avec les partenaires sociaux. Dans les faits, il semble que la loi ait surtout amplifié la complexité du sujet, et les affrontements entre les différents échelons administratifs sont légion.

A Paris, le 8 juin dernier, la mairie demandait au préfet le classement en Puce des sept zones touristiques existantes. Celui-ci a refusé, jugeant que la loi Mallié ne permet pas une telle requalification. Bertrand Delanoë, estimant le nombre de commerces parisiens ouverts le dimanche suffisant (12 000 à 15 000 établissements, soit près de 20 % du total), a préféré insister sur les risques que ferait courir une telle évolution sociétale pour les familles. Le maire socialiste s'est en revanche montré ouvert à la possibilité d'accepter jusqu'à 10 ouvertures dominicales par an pour les grands magasins, alors que la loi n'en autorise que cinq aujourd'hui.

Autre problème pointé depuis l'entrée en vigueur de la loi: la multiplication des ouvertures illégales de supérettes au-delà de 13 heures, horaire maximum autorisé pour les commerces de détail alimentaires.

A Nice, la mairie a demandé à classer une partie de son centre-ville en zone touristique, mais la préfecture n'a toujours pas donné son accord. Dans la même région, à Gap, ce sont les commerçants qui ont refusé d'être classés en zone touristique, malgré la proposition de la préfecture.

Parfois, ce sont même les grands groupes de distribution qui, après être parvenus à un accord avec leurs salariés et achevé les négociations avec les syndicats, doivent encore attendre le feu vert des préfets.

Jean Dionnot, président du Collectif des amis du dimanche (CAD), considère que la loi Mallié a créé plus de problèmes qu'elle n'a apporté de solutions : "Les préfets succombent aujourd'hui à la pression des lobbys des grandes enseignes, les dernières parts de marché qu'il restait aux commerces de proximité sont en train de tomber dans l'escarcelle de la grande distribution. Le nombre de contentieux aujourd'hui est impressionnant, il faut impérativement revenir au principe démocratique du jour de congé commun."

Dans la réalité

La France compte aujourd'hui :

- 41 zones et 566 communes classées d'intérêt touristique, dont 5 depuis le 10 août 2009 : Fréjus (Var), Villedieu-les-Poêles (Manche) et Saint-Julien-en-Born (Landes), les abords de la cathédrale de Chartres et le centre ville de Cancale. De nombreuses demandes de classement sont encore en attente.

- 19 Puce (Périmètre à usage de consommation exceptionnel) créés dans les agglomérations de Paris, Lille et Marseille. Selon le gouvernement, 30 à 40 Puce supplémentaires verront le jour prochainement.

A Plan de Campagne, près de Marseille, la création d'un Puce a tout de même mis fin à plusieurs années de conflits, et a permis de légaliser des situations de travail dominical sauvage, pratiqué par de nombreuses enseignes. C'était également le cas dans le centre commercial Usines Center, dans le Val d'Oise, où les batailles judiciaires sont achevées depuis la classification en Puce.

mardi 10 août 2010

prix du blé: "la hausse devrait se stabiliser à l'automne"

prix du blé: "la hausse devrait se stabiliser à l'automne"

La canicule qui frappe la Russie depuis plusieurs semaines a provoqué une envolée des cours du blé. Faut-il craindre des conséquences importantes sur certains prix à la consommation ?


Frappée par une sécheresse sans précédent, la Russie, troisième exportateur mondial de blé, annonçait jeudi dernier l'embargo sur ses exportations jusqu'au mois de décembre. En à peine un mois, le cours du blé sur les marchés internationaux s'est envolé et a frôlé les 240 € la tonne, son niveau record de 2007.

Par effet d'entraînement, le cours des autres céréales (orge, maïs..) a également augmenté ces dernières semaines. Conséquence : l'alimentation du bétail devrait se renchérir ce qui, à terme, pourrait conduire à une hausse des prix de la viande. Selon Agritel, ils "devraient croître de 6 à 10 %, et même de 10 % à 15 % pour le poulet dès septembre". De même, le prix de la farine se serait déjà fortement apprécié.

Pascal Hurbault, de l'Association générale des producteurs de blé, et Philippe Chalmin, économiste spécialiste des matières premières, nous livrent leur analyse.

En à peine un mois, le prix du blé à augmenté de plus de 70 % sur Euronext : est-ce inquiétant ?

Philippe Chalmin : Le troisième exportateur mondial de blé a annoncé un embargo sur ses exportations, cette situation n'a donc rien d'étonnant. Il faut prendre ces mouvements sur le marché comme des anticipations. La Russie a diminué de moitié sa production cette année : le marché mondial est déficitaire, les prix ont logiquement augmenté.

Pascal Hurbault : La situation en Russie est préoccupante, mais aujourd'hui, les schémas ont changé. Dans le passé, les reculs de production n'avaient pas provoqué un tel emballement sur les marchés. Les pénuries survenues en 2007-2008 constituent un précédent important, il y a donc des précautions à prendre, mais parfois ces anticipations se révèlent exagérées. Heureusement, grâce aux récoltes précédentes, plutôt bonnes, le niveau des stocks mondiaux reste important : 193 millions de tonnes au 30 juin 2010, selon le Conseil international des céréales (CIC).

Les prix de la viande et du pain risquent-ils d'augmenter ?

P.C : Il serait d'une illégitimité totale que les boulangers augmentent le prix de la baguette. L'impact de l'envolée des cours du blé est très faible pour les boulangers, cela ne représente que 2 ou 3 centimes par baguette. De même sur les produits carnés : les porcs et les poulets ne mangent pas de blé, mais comme le prix de la viande en général est déprimé, certains distributeurs vont en profiter.

P.H : Le blé ne représente qu'une part relativement faible du prix de la baguette, les effets resteront minimes. En revanche, le prix des pâtes, dont la fabrication requiert beaucoup de blé, devrait être plus significativement impacté.

Peut-on s'attendre à un retour à la normale rapidement ?

P.C : Cette sécheresse intervient dans un contexte de crise agricole, les effets sont donc amplifiés. Toutefois, le marché a raisonné à partir de l'embargo: une fois que les incendies seront terminés et que l'on connaitra les chiffres sur les récoltes russes, la tension va redescendre. La hausse devrait se stabiliser à l'automne.

lundi 9 août 2010

Menaces sur le pouvoir d'achat

Menaces sur le pouvoir d'achat

Entre la hausse des tarifs de l'assurance auto, les prix de l'électricité et du gaz bientôt augmentés et la baguette de pain qui pourrait dépasser 1€, le pouvoir d'achat des Français est mis à rude épreuve. Revue de détails.


Assurance auto

Les tarifs devraient, selon le quotidien Les Echos, augmenter de 3% à 5% à compter de janvier 2011. Cette hausse, qui pourrait se poursuivre durant trois ans, serait justifiée par les pertes accumulées par les assureurs en 2009, en raison des nombreux événements climatiques et de la recrudescence du nombre de sinistrés. Elle serait également une conséquence de la baisse du prix de l'essence qui a amplifié le trafic routier, multipliant le nombre d'accidents et de dégâts matériels.

Des explications peu crédibles aux yeux des associations de consommateurs. Pour Thierry Saniez, délégué général de la CLCV (consommation logement et cadre de vie), "lorsque le prix de l'essence augmentait, les tarifs ne baissaient pas pour autant. De même, il y a chaque année des catastrophes météorologiques, il n'y en pas eu plus en 2009 qu'auparavant...". Selon lui, il faut surtout s'interroger sur la composition des primes retenues par les assureurs: "Quelle part est absorbée par le commissionnement, les frais ?" Le délégué général de la CLCV ne cache pas son inquiétude : "Avec ces nouvelles augmentations, les familles paieront en moyenne 100 euros de plus par an, ce n'est pas négligeable. On voit aujourd'hui de plus en plus de gens conduire sans assurance."

Electricité

A partir du 15 août, les prix augmenteront de 3% pour les particuliers, afin de répondre aux besoins d'investissement d'EDF. L'électricien doit en effet renouveler un parc de production vieillissant. Cette hausse est aussi une conséquence indirecte de la loi NOME (Nouvelle organisation du marché de l'électricité), qui devrait entrer en vigueur à l'automne, et qui obligera EDF à céder, à prix coûtant, près d'un quart de sa production d'électricité à ses concurrents (GDF Suez, Direct Énergie).

Pour Thierry Sarnez, cette augmentation sera irrémédiablement suivie d'autres vagues. Et la situation devient alarmante : "Aujourd'hui, on assiste à un renversement de tendance, la hausse des prix représente le double de l'inflation."

Gaz

Depuis le début de l'année 2010, les prix ont augmenté de 15% environ (9% depuis le début du mois de juillet). La hausse des tarifs s'explique par la remontée, au cours du premier semestre, des cours du pétrole, sur lesquels sont indexés les prix du gaz. De plus, la baisse de l'euro renchérit automatiquement le prix des hydrocarbures importés en France, vendus en dollars. Pour la CLCV, "il faut revoir les clauses d'indexation : pourquoi s'aligner sur le pétrole alors qu'il y a de nombreuses autres ressources et gisements naturels, comme par exemple aux Etats-Unis où l'on trouve aujourd'hui plus de gaz qu'en Russie ?"

Pain

Conséquence directe de la canicule et de la sécheresse en Russie, l'une des pires de l'histoire du pays : le prix de la tonne de blé s'est envolé de plus de 70% depuis début juillet à la bourse de Paris. La décision de Moscou d'instaurer un embargo temporaire sur les exportations de blé accroît la pression sur les cours. En bout de chaîne, les boulangeries pourraient augmenter le prix du pain. Le risque : devoir prochainement débourser 1 euro, voire 1,10 euro pour la traditionnelle baguette.

jeudi 5 août 2010

Première publication à l'Express !

"La Chine deuxième économie mondiale? Rien de surprenant"

Selon des officiels chinois, le PIB de la Chine dépasserait désormais celui du Japon. La réaction de David Boitout, avocat associé du cabinet d'avocats d'affaires Gide Loyrette Nouel à Shanghai.


Que penser de cette auto proclamation des autorités chinoises qui revendiquent désormais pour leur pays le rang de deuxième économie mondiale?

David Boitout : Il faut rester prudent, car aucune statistique n'a été communiquée, mais il n'y a là rien de surprenant. La Chine était la troisième économie mondiale l'an dernier, et les derniers chiffres sur la croissance chinoise restent satisfaisants. Cela semble également réaliste au vu du potentiel du pays : même si, depuis quelques mois, la progression du PIB est moins élevée, on ne peut pas parler aujourd'hui d'un ralentissement de l'économie. Tant que la Chine ne passe pas sous la barre des 6% ou 7% de croissance annuelle, le Japon n'est pas prêt de récupérer sa place. N'oublions pas qu'au second semestre 2009, la croissance chinoise atteignait les 12%.

Les nombreuses inégalités qui subsistent dans le pays ne risquent-elles pas de freiner cette belle progression?

Les inégalités, notamment entre les riches et les pauvres, ne sont pas prêtes de se résorber ; cependant, le gouvernement est déterminé à apporter son soutien aux plus pauvres en investissant dans les régions les plus défavorisées, car il cherche la paix sociale. La question de la protection sociale n'est malheureusement pas à l'ordre du jour, mais notez qu'aux Etats-Unis, par exemple, la situation n'est pas forcément meilleure...

Un pays sans monnaie internationale peut-il prétendre devenir un jour la première puissance économique au monde?

Non, mais la Chine n'est pas pressée. Mais les autorités évoluent rapidement dans le domaine monétaire, notamment avec la réévaluation progressive du Yuan. Pékin accompagne le développement du pays, et plus particulièrement au niveau régional en permettant aux investisseurs étrangers de recourir au Yuan et d'améliorer la valeur de leurs actifs. Si la Chine poursuit sur sa lancée, nul doute qu'elle parviendra à ravir aux Etats-Unis le rang de première puissance économique mondiale, à horizon 2025, comme le prévoient la Banque mondiale et Goldman Sachs.